Je me demande combien de têtes pensantes chèrement payées par ma société se sont mises ensemble pour réussir à accoucher de ce nouveau logo ainsi que de ce magnifique slogan qui, l’un comme l’autre, honorent notre régie publicitaire.
Plus encore, je me demande bien qui a donné l’accord pour le déploiement de cette œuvre qui rappelle les pires heures du marketing français des années quatre-vingts. Outre la laideur du graphisme (non sérieusement, est-ce que ce style de coche en forme de racine carrée évidée est encore acceptable ailleurs que dans un fichier Excel ?) soulignée par le choix de la couleur censée être « or » (c’est raté), est-ce qu’en 2008 un slogan comme « La régie partenaire de votre succès » est acceptable ? Pourquoi pas « La synergie-conseil au profit de votre média management support » tant qu’on y est ?
Ô vacuité de l’esprit humain des élèves de l’ISG, quand auras-tu fini de me faire souffrir ?
Quand on passe à la station de métro Balard, on peut voir cette publicité pour un restaurant indien, le Kamalâ-Inde.
Il semblerait que c’est un endroit délicieux, où on y mange vraiment très bien comme le dit d’ailleurs le chanteur national Carlos :
Oui, bien que mort, il adore y revenir.
La seule explication que je vois : Carlos est devenu un mort-vivant et au Kamalâ-Inde, on sert de la chair humaine bouillie au curry.
Ou alors ils n’ont pas modifié leur pub depuis la mort du fils de Dolto, mais je préfère mon hypothèse précédente. Elle me paraît largement plus sensée et nettement moins loufoque.
Des sociétés qui te promettent d’apprendre l’anglais tout en mangeant des chamallows sont légion. La plus célèbre, à Paris en tout cas, c’est The Wall Street Institute et sa publicité (légendaire) où une photo issue du catalogue Getty nous montre une fille en tailleur noir et un mec en costard au téléphone, l’un et l’autre avec des sourires à s’arracher les lèvres, qui disent :
– Do you speak English ?
– Yes, I speak English… Wall Street English !
J’avais déjà dit tout le bien que je pensais de cette pub le premier juin 2005.
Anyway, ces temps-ci, il y a une pub pour Telelangue, un truc pour apprendre les langues étrangères et bien sûr l’anglais (de quoi faire « un bond dans sa carrière » promet le site internet) tout en cuisinant une paella. Rhino75 l’a photographiée :
Le truc, c’est qu’à ma connaissance, l’Anglais ne porte pas le kilt, c’est l’Écossais dans ses High Lands qui s’habille de la sorte, en général juste avant de se régaler d’un Haggis, le soir du Burns’ Supper. Or, si l’idée de Telelangue c’est de te faire apprendre l’écossais (ou ne serait-ce que son accent), attends-toi à faire un sacré « bond » dans ta carrière, mais pas dans le sens que tu crois. Si tu veux, c’est comme si pour apprendre l’allemand tu apprenais le suisse allemand.
Quand je pense à mon prof d’anglais qui venait du Pays de Galles et qui reprenait systématiquement quiconque lui disait : « vous êtes Anglais ? » en répondant : « non, je suis Britannique », je me dis que cette publicité doit particulièrement énerver de l’autre côté de la Manche.
D’ailleurs, l’autre jour, j’ai vu écrit au marqueur « cette pub est une honte » sur l’affiche.
Mon blog – qui ressemble sensiblement au désert du Sahara après une tempête de sable – n’a pas encore rendu l’âme. Loin de là ! D’autant que je suis bientôt au chômage. Ça va être l’occasion de lui donner un sacré coup de turbo (non, je dis ça, je spécule, j’y suis pas encore, j’ai juste discuté avec mon chef et il m’a dit : « Ne t’inquiète pas, il ne se passera rien avant octobre, prends tes vacances l’esprit tranquille »).
Aujourd’hui, donc, voici une toute nouvelle série intitulée Les Grandes erreurs du marketing (et en même temps, c’était le titre de mon post, donc si tu es futé, tu as compris que c’était ça, la série, d’autant que j’ai eu la présence d’esprit d’ajouter un «1» entre parenthèses ce qui signifie — et les plus éclairés d’entre vous l’auront compris — qu’il y aura une suite[1]).
Mardi, le magazine Les Inrocks sortait en kiosque et comme je suis abonné, je l’ai reçu dans ma BAL[2]. La couverture promettait un article sur CSS, un retour sur la télévision publique et l’histoire de Led Zep.
Or, cette couverture était une couverture-gigogne dédiée à l’opérateur téléphonique SFR et à ses nouveaux forfaits Illimythics (soi-disant) illimités. Oui, j’écris soi-disant parce que bien que la publicité arbore fièrement la mention « Musique illimitée – Appels illimités soir et week-end – TV, surf et texto illimités », il faut comprendre : paie dix euros de plus par mois pour les appels, douze euros pour la musique (et dès que tu arrêtes de payer, la musique, tu l’as dans le fondement), et pour Internet, ne t’avise pas de faire de la voix sur IP. Bah ouais, manquerait plus que t’arrêtes de téléphoner avec ton portable, gros niaiseux.
Mais là où je veux en venir (parce que si c’était pour dire que les opérateurs télécoms étaient des voleurs, ça n’aurait guère d’intérêt puisque c’est de notoriété publique), c’est que la couverture-gigogne, c’est super chiant. Déjà quand ça s’ouvre en deux, ça prend la tête, mais là, pour faire encore plus stAÏle, celle-ci s’ouvre en trois. Comme un poster central de Playboy, la Bunny en moins.
En plus, honnêtement, c’est pourri, ça tente de faire dans le genre iTunes, mais le graphiste a simplement repris la même guitare Gibson (Flying V) en la recopiant je ne sais combien de fois avec un vague filtre Homothétie de Photoshop et en appliquant une couleur au corps de chaque instrument (pattern répété trois ou quatre fois dans l’image). Bref, au-delà de toutes considérations pratiques, c’est l’exemple même de la pub foirée de bout en bout.
Et dans le métro, au bout de la vingtième fois que la couverture glisse au sol et que tu marches dessus, d’un geste rageur et vengeur, tu l’arraches et tu la bazardes en rentrant chez Orange pour t’acheter un iPhone 3G.
[2] Une BAL, c’est une boîte aux lettres en abrégé dans laquelle on reçoit des lettres en papier et pas des mails par octet, notion très vingtième siècle, s’il en est.