Skip to content

Mois : avril 2021

Dans notre série Les Grandes erreurs du marketing

Les étranges galettes du Routard nippon

Un an et un peu plus que nous sommes bloqués chez nous, comme des poissons dans un bocal – et cette simple comparaison devrait convaincre les propriétaires d’aquarium de jeter le bac à la rivière. La pandémie qui nous frappe est un châtiment de Dieu, tout le monde le sait, sinon comment expliquer qu’elle nous tombe dessus alors que des milliards d’hommes et de femmes prient à travers la planète (OK, pas moi, mais j’ai une bonne raison, c’est à cause de la télé, elle ne me lâche jamais, la saloperie).

Alors bon, dans ce marasme ambiant, je trouve que c’est le moment idéal pour vous raconter mes vacances au Japon. Enfin, je ne vais pas vraiment vous les raconter, mais je vais juste vous coller des photos (l’occasion de tester la fonction Gallerie de WordPress).

Nous, en fait, je vais vous parler de la préparation au voyage. Je reviendrai un jour sur tout le périple quand je penserai que ma vie mérite d’être livrée sur un blog (hum). Et plus particulièrement cette notule sera un prétexte pour douter de l’impartialité du plus célèbre guide de voyages français : Le Routard !

Le Routard, on l’achète dans deux cas :

  • Soit parce qu’on part en voyage et qu’on a eu trop la flemme de préparer les visites/
  • Soit parce qu’on rêve de voyager et qu’on n’a pas les moyens de se payer un billet pur le Brésil, alors en attendant, on s’offre le Routard comme un ticket de loto et quand des amis passent, on leur dit : « Ah ouais, je prépare mes vacances en Amérique du Sud. Mais non, j’ai pas vraiment décidé où j’irai, je vais lire le Routard avant pour me décider » (et en général, d’ici à qu’on y aille, bah Le Routard a connu trois changements de maquette).
  • Moi, j’étais dans le premier cas : les billets avaient été pris un an à l’avance, et j’avais déjà booké les arrêts et les hôtels. Alors, le Routard était là pour lister les musées à visiter et surtout m’aider à choisir des restaurants. Et là… Surprise !

    Comme le Japon est plutôt connu pour sa gastronomie raffinée, je m’attendais à découvrir des tas d’adresses originales inconnues du grand public. Eh bien, je n’allais pas être déçu du voyage.

    Au quartier Impérial, le Routard me propose d’abord un resto chinois et ensuite « Chez Olivier », un restaurant français méchamment chicos. À Marunouchi, les auteurs ne tarissent pas d’éloges pour « La Boutique de Joël Robuchon » : « Le self le plus chic de Tokyo à des prix très démocratiques ». On y sert des « galettes » à pas loin de 12 euros. Il est loin le temps du sac à dos ! À Nihonbashi, cette fois-ci, pas d’hésitation. Rendez-vous « Chez André du Sacré-Cœur », un bistrot créé par un français « à l’identique de celui de son père à Montmartre ». On y déguste « une très bonne cuisine de bistrot française ». Et il y a aussi le « Clos Montmartre », sur une autre page, qui propose une fricassée de rognons et ris de veau. C’est bien la peine de parcourir 10 000 bornes pour bouffer des ris de veau, non ? Alors, j’imagine bien que les voyageurs ne veulent pas manger tous les jours de la cuisine japonaise, mais tout de même ! Il faut attendre le quartier de Ginza pour que les auteurs nous proposent des restaurants endémiques, avec tout de même la recommandation de la « Brasserie Paul Bocuse », parce que hein, c’est sympa le poisson grillé, mais quand même, des manouls de la canourgue avec « un blanc du Languedoc », c’est ça la vie !

    Quelques pages plus loin, à Roppongi, Le Routard nous propose cette fois-ci « L’atelier de Joël Robuchon » et la « Brasserie Paul Bocuse ». Attendez… On ne les a pas déjà vus ? Ah bah si, des fois qu’on les ait ratés au premier passage, la repasse est gratuite. Surtout qu’à Ebisu, figurez-vous que le Routard recommande aussi « La Table de Robuchon » dont le texte débute par « Vous rêviez de manger un jour chez Robuchon, vous pouvez le réaliser ici sans attentat au portefeuille ». Au prix du ticket d’avion et des hôtels, je doute qu’aller à Tokyo pour déjeuner chez Robuchon soit vraiment l’idée du siècle.

    Mais tout ça n’est rien devant l’acharnement des auteurs à vouloir absolument qu’on déguste des crêpes bretonnes. Au quartier de Kagurazaka, on a le droit au « Café-crêperie Le Bretagne », qui sert des galettes saucisses dans un cadre de crêperie « reconstituée avec authenticité et fraîcheur ». À Shibuya, allez donc à « Crêperie Ti Rolande » et demandez sa « saucisse bretonne made in Japan aussi bonne qu’à Quimper ». Sérieusement ? À Ikebukuro, que faut-il déguster à votre avis ? Bah une crêpe, mon n’veu à la « Crêperie du Mont Saint-Michel » où les auteurs reconnaissent pour une fois que l’endroit n’est probablement « pas très dépaysant ». Tu m’étonnes.

    Ok. Donc là, j’en étais à « C’est quoi votre problème avec la Bretagne ? » et je pensais que ça se calmerait, mais non. Les auteurs du Routard veulent qu’on mange des crêpes au Japon. Quelques pages plus loin, à Omotesando, ils nous encouragent à nous sustenter chez « Breizh Café Crêperie », « la première vraie crêperie du Japon » dont le fondateur est un certain B.L. : « On y concocte de délicieuses galettes de sarrasin dont les Japonais raffolent, mon tout arrosé d’un cidre du val de Rance gouleyant à souhait ». Quand j’attaque Shinjuku, je me dis : « Bon, c’est fini, maintenant, les crêpes, non ? ». Toujours pas. Dans la rubrique « Où manger ? », un nom familier revient : « Breizh Café Crêperie ». Et avec un tout nouveau texte où on lit « Paris-Cancale-Tokyo, depuis 1996, dans ces trois villes, les crêpes du Breton B.L. enchantent les amateurs ». (cliquez pour lire, c’est encore mieux).

    Ça devenait trop gros. Je repris le Routard à la page 1. Et là, ce fut la révélation.

    C’était donc ça : des yakuzas bretons avaient noyauté Le Routard pour obtenir ses faveurs. Alors, je sais, on me rétorquera que cette marque d’amitié n’est absolument pas cachée et que le guide est indépendant. N’empêche que pour le reste de ma vie, je boycotterai systématiquement les crêperies recommandées par le Routard. Sauf celles du Routard de la Bretagne. Mais il n’y en a aucune : le guide ne propose que des izakayas.

    Et mon père dessina un crocodile

    Le virus de l’informatique

    À l’école élementaire, Gwenaël était mon meilleur ami. Il y avait une raison évidente à cette sympathie : il possédait chez lui une console de jeux vidéo. Une Atari 2600. Dans les années quatre-vingts, ce n’était pas rien ! Quand il m’invitait le samedi chez lui, c’était la fête. Hélas, comme il pouvait jouer avec sa console quand il le souhaitait, il ne comprenait guère mon engouement à passer une bonne partie de l’après-midi devant. C’est probablement pour ça qu’il a cessé de m’inviter. Enfin, je crois même qu’il a déménagé. Pour vous dire comme je devais être agaçant.