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Spring Breakers : la critique s’emballe-t-elle ?

On ne va pas se mentir, les critiques ont mouillé pour Spring Breakers, le nouveau film de Harmony Korine. Les Inrocks ont même consacré leur couverture au phénomène :

Inrocks

Avouons que sur ce film, Les Inrocks se sont dépassés, soutenant le film depuis la Mostra de Venise où il était comparé à du « Terrence Malick sous ecstasy ». Cette première critique du film avait au moins le bon goût de garder une certaine retenue : « [On peut] s’agacer de la façon dont Korine botte en touche, portant un regard à la fois critique et séduisant sur la violence de la gangsta weltanshung. Mais au final, ses twists ironiques, son humour noir, son énergie de série B, sa verve formelle, sans oublier la plastique superbe de ses actrices emportent le morceau ».

Aucune retenue lorsque le même auteur a écrit sa critique lors de la sortie officielle de Sping Breakers comparant cette fois-ci le film à du « Godard boosté au Red Bull » : « Korine filme cette débauche de formes et de couleurs avec une énergie folle, variant ses cadrages, balançant des décharges de montage en cut-up, bombardant les mots Spring Break comme un mantra » avant de conclure, superbe : « Derrière le rêve illusoire du Spring Break, les fractures ethnico-sociales et la violence de l’Amérique rôdent toujours. Korine déchire la carte postale floridienne et déniaise le Spring Break. »

Une autre « plume » des Inrocks officiant sur les ondes du Masque et la plume, vivant mal que le film n’ait pas été retenu par un Jérôme Garcin inspiré, a tenu à en parler lors des conseils à la fin de l’émission ajoutant à cette pandémie d’onanisme intellectuel : « C’est une critiqueuh de l’état terminale de la sociaytay du spayctacle qui va vraymant vayrs sonne apocalypse, mays cette apocalypse, i en fayt une sorteuh de feuh de joâ et c’est hein film totalemant jubilatoâre à la fois fayroce et trés trés drôlay ».

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On aura bien sûr compris que si Les Inrocks ont beaucoup apprécié le film, c’est qu’il leur permettait, sous le vernis « œuvre d’auteur », de foutre des meufs en bikini sur la couverture, s’assurant de surcroît, grâce à la présence de Vanessa Hudgens et de Selena Gomez, un effet viral évident et une probable augmentation subtile des ventes en kiosque. D’ailleurs, j’ai trouvé la couverture des Inrocks en question sur le site de Selena French Web. Quand je pense ce qu’était ce journal, j’ai mal à ma mémoire.

Je me moque des Inrocks parce que je suis un connard jaloux, mais ce sont loin d’être les seuls à s’être branlés la nouille devant Spring Breakers : Les Cahiers du cinéma, Elle, Télérama et Paris Match ont, semble-t-il, été tout aussi émoustillés par ses jeunes filles en fleur et en bikini pendant 99% du film :

Critique

Pourquoi une telle unanimité ? Parce que c’est pas tous les quatre matins qu’ils vont voir un film qui peut se vendre auprès du public comme « film d’auteur » (parce que c’est Harmony Korine qui l’a réalisé, le GÉNIE qui a pondu en deux semaines le scénario de Kids, qui a filmé l’ovni Gummo et le très radical Julien Donkey Boy, qu’il est sorti avec Chloë Sevingy, qu’il a pris des drogues, qu’il a bu de l’alcool, qu’il a été très malheureux et qu’il adore le cinéma français depuis ses douze ans) où quatre filles passent leur temps à poil et où le nihilisme du scénario est un support à toutes les interprétations fumeuses propre au plaisir du critique de cinéma.

Et concrètement ? Spring Breakers est une belle grosse bouse. C’est une tentative de réhabilitation maladroite et désespérée d’un type paumé qui ne vit que sur cette gloire éphémère qu’ont été les cinq premières années de son travail. Korine refait du Gummo, pour ainsi dire, en moins extrême et surtout avec des stars pour s’affirmer bankable. Un statut soutenu artificiellement par des critiques en mal d’émotions.

Alors, oui, certains se pâment devant le montage « cut-up » comme ils l’appellent eux-mêmes, fascinés par l’idée de montrer quelques plans d’une séquence avant qu’elle n’arrive dans le scénario, idée liée par des bribes de dialogues. Ainsi, l’une des jeunes filles va se faire tirer dessus, on voit trois plans d’elle avec du sang sur le bras, avant même qu’on ne nous ait montré la balle le traverser (son bras). D’autres s’extasient devant les répétitions des dialogues (appelons ça « remplir le vide ») « totalement jubilatoires » pour reprendre le critique du Masque et la plume. Par exemple, ce dialogue répété une quinzaine de fois :

  • On va le faire ?
  • Tu as la trouille ?
  • Je suis sûre que tu as la trouille…
  • Oui, je suis le plus grand trouillard de la planète…
    (dix secondes de pause)
  • On va le faire ?
  • Tu as la trouille ?
  • Je suis sûre que tu as la trouille…
  • Oui, je suis le plus grand trouillard de la planète…
    (dix secondes de pause)
  • On va le faire ?
  • Tu as la trouille ?
  • Je suis sûre que tu as la trouille…
  • Oui, je suis le plus grand trouillard de la planète…
    (dix secondes de pause)
  • On va le faire ?
  • Tu as la trouille ?
  • Je suis sûre que tu as la trouille…
  • Oui, je suis le plus grand trouillard de la planète…
    (dix secondes de pause)

Mais si voir des culs et des seins comble vos appétits cinématographiques, comme cela semble être le cas pour la critique française, alors un seul mot : foncez.

Published inRegarder des images

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