Oui, bon, je sais, vous allez me dire : « encore une fois la Loi de Murphy », tout ça parce que je vais me plaindre quelques minutes de mon début de journée qui a été aussi chiant que l’écoute du coffret de l’intégrale de Michel Sardou en boucle. OK.
Et bien non. Jeune ami (ou vieux lecteur), je vais me permettre de te faire remarquer un truc, ce que tes amis et toi appelez la « loi de Murphy », ce n’est pas la loi de Murphy. Ce n’est pas non plus le destin, ni le Yin et le Yang qui se déséquilibrent.
La loi de Murphy, c’est une vaste fumisterie.
Il n’existe pas de loi qui dit que « ce qui peut empirer empirera » avec le corollaire « ce qui ne peut plus empirer empirera quand même ». Ce qu’on appelle communément la loi de Murphy, je vais vous dire tout de go ce que c’est : Dieu.
Oui, Dieu.
Car Il existe.
Et comme Il est omnipotent et omniscient, qu’on soit huit, cent mille ou quinze milliards, c’est pareil pour lui. Il peut s’occuper de chacun de nous sans se préoccuper de ce qui se passe à côté. C’est d’ailleurs pour ça qu’on peut prouver sans erreur possible que le blog de Dieu qu’on trouve sur la toile n’est pas écrit par Dieu, car Il aurait le temps de rédiger beaucoup plus quels que soient les résultats des championnats de ping-pong.
Ainsi, Il peut tout à fait s’intéresser à un paumé mauvais charpentier de Judée en même temps qu’Il s’intéresse à faire trébucher une vieille dans la rue en 2020. Car, il faut le savoir, Dieu est fondamentalement méchant. Enfin, pas méchant, mais Il aime rire du malheur des autres. Donc Dieu est allemand, puisque – c’est bien connu – seuls les allemands ont un mot dans leur vocabulaire pour exprimer cette idée : « schadenfreude ».
Et Dieu, c’est un peu comme Bouchard, mon prof de maths de première. Il a ses têtes de turcs (c’est bon ? turc ? je peux dire ?). On sait pas trop le processus de choix, disons que c’est un peu comme le loto. S’Il vous a à la bonne, Il vous fait naître dans un endroit un peu sympa, sinon, c’est les mines de diamants en Afrique et pas le droit de moufter.
Et comme Bouchard, il y a ceux qu’Il encadre un peu moins que les autres. Et quand ça nous tombe dessus, c’est la guigne. On passe tout le temps au tableau, on se fait engueuler, on est convoqué chez le proviseur. Bon, c’est là que l’analogie s’arrête parce que Dieu ne réfère pas à un proviseur de ses actions.
Nous voilà donc avec notre Dieu qui a décidé – on ne sait pas pourquoi – de nous faire chier. Tout comme un petit nombre d’élus ont le droit, eux, d’être choyés. Pas de raison, juste comme ça, c’est vraiment un délit de faciès. On lui plaît ou pas, mais une fois qu’Il a pris sa décision, Il s’y tient. Avec Bouchard, un 14 pouvait changer la donne (mais c’était pas facile d’avoir 14 quand il vous avait dans le nez).
Il y a ceux qu’Il déteste. Et là, vous allez en chier : famine, travail à cinq ans, suicide de votre famille, Michel Drucker vous invite à Vivement Dimanche, bref, la grosse merde.
Et il y a ceux qu’Il aime bien faire chier, en raison de notre « schadenfreude » sus-mentionné (oui, c’est un peu confus car je perds le fil de mon histoire en raison du train qui bouge trop). Typiquement, moi, Dieu, Il m’a pas à la bonne. Il aime bien me taquiner. Ça le fait marrer.
Ce matin, je me lève, je pars retrouver ma famille donc il faut que je me lève, envie de sieste ou pas.
Direction la cuisine où je me prépare un thé la tête dans le cul, donc j’en renverse la moitié à côté, je dois passer la serpillère et ça tombe trop bien car je suis déjà pas à la bourre, je finis la vaisselle, je prépare la poubelle à sortir, mais comme j’ai perdu le seau, elle coule tout le long du couloir.
Rebelotte la serpillère, En revenant, je me rappelle que la bouilloire fuit (c’est ballot), y a de l’eau partout, mais maintenant la serpillère est trop trempée, donc on passe à la mission essuie-tout et dans un véritable geste écologique, j’en utilise un rouleau complet pour éponger. Je ramasse tout le papier mouillé pour le jeter. Merde, c’est vrai : j’ai pas remis de sac poubelle.
« Pas de panique, reste zen », je me dis. Mais je sens bien que je commence à plus être zen du tout. Je me mets à chanter (c’est ce que je fais quand je m’énerve, pour faire passer la tension inhérente aux emmerdements). Donc sur un non-air musical je commence : « super, journée de merde qui fait chieeerr, je sens que ça va être bien marraaaaaaaaant, t’as vraiment rien de mieux à foutre que ça monsieur Dieuuuuuuuuu ». C’est alors que dans un second temps, je me dis : « non, non, psychologie inversée, mec, fais comme si ça te passait grave au-dessus ». Je reprends ma chanson : « Mais je m’en fous… parce que c’est exactement ce que je voulaiiiiiiiis, Donc ça m’emmerde paaaaaaaas ».
Je finis tant bien que mal ma préparation, renversant la brosse à chiotte par terre, écrasant le dentifrice tombé sous mes pieds et ne retrouvant pas mes chaussettes sur lesquelles j’étais assis quand l’heure fatidique de mon départ arrive.
Il est 9 heures, c’est alors que le temps accélère, les minutes se transforment en secondes, et je commence à voir poindre la catastrophe du ratage de train.
Je commence à me dépêcher, je prends ma valise à roulette, un autre petit sac, et reste les deux sacs de cadeaux, le premier avec les jouets des gosses bien encombrant, le second avec un livre et une boîte de chocolats. Au moment de prendre ce dernier, j’arrive à peine à le soulever. Je regarde si quelqu’un n’aurait pas mis un parpaing à l’intérieur pour me faire rigoler, mais non, c’est juste le livre qui a pris 200 kilos dans la nuit. Ok. Ça va pas être facile. Je sors tant bien que mal avec tous mes sacs, quand le premier avec les jeux d’enfants double de volume ! Je tire pour lui faire passer la porte, mais il se déchire. Je ramasse tout en quatrième vitesse, range n’importe comment la boîte de gros lego qui va finir en playmobil à cette allure et me jette le long de la rue courant vers la station de métro, mais bien obligé de m’arrêter à tous les feux pour laisser passer les voitures.
Lorsque j’arrive Gare de Lyon, j’ai finalement dix minutes d’avance, je suis laaaaaaaarge.
Le train est déjà là, les gens bien installés et j’essaie de caser les reliquats de cadeaux là où je trouve de la place. Finalement, je m’assois, mais là, Dieu – qui n’a pas fini de me faire chier – retarde l’arrivée du conducteur de notre tain en même temps qu’Il lance une inondation sur les rives du Gange, ce bâtard !
Et puis, Il a dû se lasser car le conducteur est arrivé et le train est parti.
Me reste plus que quelques heures à attendre avant de retrouver ma famille, et je me dis que c’est pas un mauvais bougre après tout, ça doit être assez chiant d’être le Dieu Unique. On doit s’ennuyer tout seul là haut. Normal qu’Il ait envie de rire un peu. Bon, je préférerais qu’Il soit une aide plutôt qu’un frein dans ma vie, mais après tout hein, ça pourrait être pire : je pourrais travailler dans les rizières en Thaïlande depuis mes huit ans…
Attendez, un instant, amis lecteurs. La dame à côté veut se rassoir. Oui, Madame, je me lève pour vous laisser la place, attendez j’enlève l’ordinateur et… mais ! Faites attention avec votre café vous allez en renverser partout ! Attention ! ÇA COULE SUR MON PORTABLE !
Krzwrtstghtuprpprtrtt *plonk*