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Mois : octobre 2010

Les Grandes erreurs du marketing (13) : la traduction audacieuse

Comme je suis un être pur qui milite en faveur de toutes les ONG au monde, je suis bien évidemment contre le trou dans la couche d’ozone, contre la déforestation de l’Amazonie, contre la malnutrition (en Afrique exclusivement), contre le travail des enfants, contre la disparition des grands pandas de Chine et, par extension (cherchez pas), contre la malbouffe.

Conclusion : moi au MacDonald’s ? Et pourquoi pas violer un chaton mort avec des vers qui sortent du museau ? (Je trouve cette image très forte au petit déjeuner.)

Tout le monde n’a pas mon humanisme et j’ai même des amis qui vont manger dans des fast-foods de la porte de Champerret. On ne m’y prendra pas.

Bref.

En ce moment, chez MacDo (putain, vous ne pouvez pas imaginer comme ça me file faim de parler de ça à 6 heures du matin), il y a (ça ouvre à quelle heure le MacDo ?) une opération (il y en a un à Denfert, c’est à dix minutes) promotionnelle (on peut y aller en slip ?) pour gagner des cadeaux (je vais prendre trois MacDeluxe) et notamment des trucs gratuits (et des nuggets) comme des hamburgers ou une grande boisson (c’est bon, ça, les nuggets) dans le cadre de l’achat (ou le KFC ?) d’un double menu géant (un bucket ?).

Donc, c’est une carte à gratter qui ressemble à ça (photos © krstv qui m’a envoyé ce scoop) :

mdo_1.jpg

« Monopoly Reload » lit-on. Vous le savez, en France, on n’a pas le droit depuis au moins Toubon et peut-être même avant, d’écrire en langue étrangère dans un message publicitaire sans astérisquer (quoi ? tu connais pas ? c’est le verbe dérivé du nom, c’est très commun, merde, sors de devant ton ordi !) le vocable exotique pour le traduire en bon français bien de chez nous. C’est ce qui fait que les pubs pour Eurodisney pour un public touristique sont bardés de renvois hexagonaux en bas de page.

Chez MacDo, on se plie à cette obligation de bonne grâce. Société internationale de 400 000 employés à travers le monde (sans compter probablement les franchises), la firme sous-traite sa com à The Marketing Store qui « ne vise pas des consommateurs » mais qui « est inspiré par eux ». Et l’inspiration a été (très) grande pour traduire « reload » :

mac2.jpg

« Reload » est devenu « re-booster ». Non seulement, la traduction n’est pas bonne, mais en plus, ils utilisent un autre mot anglais(*).

C’eut été drôle, mais The Marketing Store n’est pas connue pour son humour, qu’un autre astérisque nous renvoie vers une autre traduction, genre « Re-booster = re-increase » et ainsi de suite.

Notons que sur le site US de McDonald’s, la promo, c’est : « Monopoly is back! and the odds are better than ever ». Aucune mention de « reload » nulle part. Acclamons donc le Dieu du marketing capable de tels miracles d’approximation.

Bon, et il est sont où mes burgers ?

PS : En rédigeant cet article et pour des raisons complètement stupides, j’en suis venu à vérifier les infos trouvées et j’ai découvert que MacDonald’s a son siège social « 1 McDonald’s Plaza » dans l’Illinois (salut Sufjan). Dingue, non ? Je ne résiste pas à vous montrer le bâtiment principal qui me fait rêver :

gmap.jpg

(*) Certes, je concède que « booster » est dans le Robert depuis longtemps mais avec les définitions : « synchrotron injecteur d’un accélérateur de particules », « Propulseur externe auxiliaire destiné à accentuer la poussée des engins spatiaux » et « amplificateur accroissant la puissance d’un autoradio » avec pour chaque définition une recommandation officielle en français.

Les Grandes erreurs du marketing (12) : l’autopromo masquée

Disclaimer : ce post est long et chiant (et non y a pas de contrepèterie ici).

Il y a bien longtemps, alors que la majorité des gens sur Twitter aujourd’hui tétaient leur biberon à la térébenthine, j’étais déjà sur Internet à arpenter les arcanes du savoir universel. On allait sur les forums de discussions, les « newsgroups », pour discuter avec ses potes autour d’un sujet de conversation donné : les animaux, la musique, la littérature, la langue anglaise… Moi, j’étais sur fr.rec.cinema.discussion, le newsgroup consacré au cinéma. Il y avait une ribambelle de connectés et nous devisions brillamment des œuvres majeures du septième art et ces milliers d’octets de discussions sont dorénavant perdus à jamais dans les limbes de l’internet. Inception staïle.

Un peu comme sur Twitter aujourd’hui, il y avait les cadors, ceux qui parlaient beaucoup plus fort que les autres et qui avaient une cour versaillaise derrière eux prête à mordre le jarret des importuns. Et, comme on n’était pas vraiment limité à 140 caractères les conversations s’éternisaient et les citations intégrales s’accumulaient jusqu’à ce que — par ras-le-bol — on ne lâche l’affaire.

L’un d’eux, particulièrement prolixe et qu’on appellera YR pour se prévenir des potentiels référencements malencontreux, pouvait tanner quelqu’un des heures pour avoir osé dire qu’il appréciait un film que lui-même considérait comme nul. La demi-mesure n’existait pas dans son vocabulaire et il a mis son talent d’emmerdeur professionnel au service de la grande littérature : les essais cinématographiques.

Jusqu’ici, il en a rédigé deux. Le premier sur Woody Allen « dans un style simple et clair », le second sur la mise en scène au cinéma « dans un style simple et précis » (il a été invité la semaine dernière sur Radio Courtoisie pour en parler) :

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Je ne vous les conseille pas, mais ce n’est pas vraiment là où je veux en venir.

Ses livres sont disponibles sur Amazon. Et dans les jours qui suivirent la sortie de son premier opus sur Woody Allen en 2006, trois commentaires particulièrement élogieux sont apparus, l’un de l’éditeur et deux d’internautes dithyrambiques :

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« Ouvrage pertinent » et « à marquer d’une pierre blanche ». Je connais le bonhomme, c’est un peu improbable, mais après tout, il a ses fans. Et même si Jean Lomi et Gédéon Parmesan n’ont jamais écrit qu’un commentaire chacun, rien n’indique qu’il s’agisse d’YR dans un geste d’autopromotion de seconde catégorie.

Depuis, plus rien n’avait été écrit sur ce bouquin. Mais un internaute, face à une telle logorrhée, s’est décidé à l’acheter (je ne sais pas qui c’est) et la semaine dernière, il le commente sur Amazon pour se dire « très déçu » :

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Le même jour débarque un certain Zelig — qui avait jusque là publié sept commentaires (dont une descente en flamme d’Un Prophète) (et qui devait probablement faire de la veille quotidienne sur ce livre en particulier) — pour assassiner le malheureux lecteur :

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Puis Zelig se dit qu’il est temps de pondre un autre commentaire dans un style « simple et clair et précis » et bien sûr, il va sur la page de l’autre livre d’YR et nous sort une analyse fracassante :

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Évidemment, on se demande si ce Zelig ne pourrait pas être lui-même l’auteur du livre, ce fameux YR. Mais comment en être sûr ? C’est peut-être un défenseur des grands essais de génies incompris après tout. Alors, en regardant les sept autres commentaires de Zelig, on tombe sur celui-ci :

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qui ressemble étrangement à la chronique de la même vidéo sur un journal musical en ligne et signé par… YR lui-même :

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Le mec qui s’auto-félicite de sa propre production en se faisant passer pour un internaute lambda et qui en profite pour insulter le goujat qui n’a pas su apprécier son œuvre, je dis : « grande classe ».