Je ne suis pas le seul à m’en être aperçu, je me demandais juste si c’était réellement une erreur. Ça me paraissait trop gros. Voyez donc cette très belle image promo du Petit Nicolas :
Voilà, alors comme ça, on se dit que le décorateur a fait un joli boulot de reconstitution, qu’il n’y a pas le moindre doute que nous sommes dans une jolie France ripolinisée qui sent bon le formica et de Gaulle quand soudain un détail attire notre regard : la plaque d’immatriculation « 708 JXJ 75 ».
D’abord, même dans les années soixante, je ne vois pas trop où ils ont trouvé ce genre de pavillons de banlieue à Paris, mais bon après tout peut-être que le papa du Petit Nicolas a préféré s’immatriculer à la capitale pour finalement vivre à Palaiseau ou au Vésinet ou peut-être est-ce une voiture d’entreprise, que sais-je encore ?
Ensuite, une autre question turlupine le connard que je suis : y avait-il déjà des plaques minéralogiques à trois lettres à l’époque ? C’est fort possible vu que je ne suis vraiment pas un expert sur le sujet, mais certains sont très très calés, eux. En cherchant un peu sur internet (parce qu’il semblerait que décemment je n’ai rien d’autre à foutre de mon samedi matin), on tombe sur des fous furieux : une association de collectionneurs de plaques d’immatriculation, Francoplaque.
Et sur leur site, on trouve un historique de la nomenclature française. Si c’est pas ma chance, ça ! Alors, en fouillant plus en détail, on apprend qu’à partir des années cinquante, les plaques sont numérotées sous la forme de chiffres (de un à trois pour tous les départements, sauf Paris où la plaque pouvait être composée de quatre chiffres – les choses évoluent par la suite) puis de lettres (une, deux puis trois – à ce moment-là, on revenait à un maximum de trois chiffres pour ne pas avoir plus de huit caractères sur la plaque) et enfin du département (une foule de détails captivants est à découvrir sur leur site). Mais la grande question restait en suspens : quand donc à Paris a-t-on eu la première plaque avec trois chiffres et trois lettres ? Et ce merveilleux site m’a fourni la réponse sur une autre page qui répertorie pour chaque année la première immatriculation par département (des fous, je vous dis).
Bingo : la circulaire qui autorise l’immatriculation à trois lettres date du 3 janvier 1972 et, à en croire un tableau soigneusement renseigné, c’est entre 1974 et 1975 qu’apparaît le premier 1 AAA 75 (qui fait suite au 9999 ZZ 75). Si l’on poursuit l’investigation (digne d’un Derrick), c’est entre 1992 (341 JSP 75) et 1993 (319 KEK 75) qu’a pu être donné un tel numéro à une plaque minéralogique. Puisque théoriquement, les histoires du Petit Nicolas se déroulent « dans une France de la petite bourgeoisie du début des années soixante », on peut sans se tromper en conclure avec un plaisir inouï et un sourire ravi qu’il s’agit bien d’une grosse bourdasse de l’accessoiriste et ranger cette photo dans ma collec’ des grandes erreurs du marketing.
Bon… et si j’allais faire quelque chose de ma vie, maintenant ?